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Relations collectives de travail

Les partenaires sociaux au sein du CNT ont conclu le 27 septembre 2022 la CCT n° 162 instituant un droit de demander une formule souple de travail. Cette CCT transpose la section relative aux formules souples de travail de la directive (UE) 2019/1158 du 20 juin 2019 concernant l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants. Cette CCT s'applique à tous les travailleurs occupés dans le secteur privé et est entrée en vigueur le 1er octobre 2022.

1. Qu'est-ce qu'une formule souple de travail ?

Le droit de demander une formule souple de travail signifie que le travailleur peut demander un aménagement de ses modalités de travail existantes. Cet aménagement peut revêtir la forme :

  • d’un recours au travail à distance, tel que le télétravail ;
  • d’une adaptation de l’horaire de travail ;
  • d’une réduction du temps de travail.

2. Qui peut demander une formule souple de travail ?

a. Soin d'un enfant

Un travailleur a le droit de demander une formule souple de travail pour prendre soin de son propre enfant ou d'un enfant du partenaire avec lequel il cohabite ou est marié, jusqu'à l'âge de 12 ans.

La limite d'âge de 12 ans est portée à 21 ans lorsque l'enfant est atteint d'une incapacité physique ou mentale d'au moins 66 % ou souffre d'une affection médico-sociale grave.

La condition d'âge de 12 ou 21 ans doit être satisfaite au plus tard pendant la période de formule souple de travail. Si l'employeur opte pour un report, mais que la demande a été faite correctement et dans le délai applicable, la période de formule souple de travail peut dépasser la limite d'âge.

b. Soins personnels ou aide personnelle à un membre déterminé du ménage ou de la famille qui nécessite des soins ou une aide considérables pour une raison médicale grave

Un travailleur qui souhaite octroyer des soins personnels ou une aide personnelle à un membre du ménage ou à un membre de la famille qui nécessite des soins ou une aide considérables pour une raison médicale grave, a également le droit de demander une formule souple de travail.

La raison médicale grave doit être prouvée par un certificat médical du médecin traitant.

3. Condition d'ancienneté

Le travailleur doit avoir été occupé par l'employeur pendant six mois avant de pouvoir demander une formule souple de travail. Les périodes de travail intérimaire sont prises en compte.

4. Procédure de demande

Le travailleur doit introduire sa demande par écrit à l'employeur trois mois à l'avance. Ce délai peut être raccourci conventionnellement.

La demande contient :

  • le type de formule souple de travail demandée ;
  • la référence expresse à la CCT n° 162 ;
  • la date de prise de cours et de fin de la formule souple de travail ; et
  • le but de soins à prodiguer pour lequel la formule souple de travail est demandée.

Au plus tard le jour de la prise de cours de la formule souple de travail, le travailleur remet le ou les document(s) justifiant le but de soins invoqué.

L'employeur doit répondre par écrit dans un délai d'un mois à compter de la demande. S'il n'accepte pas la demande, il doit en outre motiver sa réponse par écrit. Dans son examen, l'employeur tient compte des besoins de l'entreprise ainsi que, de manière maximale, des besoins du travailleur. Le travailleur peut réitérer sa demande si l'employeur ne répond pas dans un délai d'un mois.

Si l'employeur marque son accord, l'employeur et le travailleur définissent ensemble les modalités de la formule de travail.

L'employeur peut reporter l’exercice d’une formule souple de travail pour des raisons concrètes et justifiables liées au fonctionnement de l'entreprise. Il communique ces raisons concrètes au travailleur dans un délai d'un mois à compter de la demande. Ce report ne peut avoir pour effet de rendre impossible la formule souple de travail.

L'employeur peut également formuler une contre-proposition motivée. Le travailleur peut l'accepter ou la refuser.

En cas de refus de la demande, l'employeur communique au travailleur les raisons concrètes du refus dans un délai d'un mois à compter de la demande. Les raisons peuvent résider dans la durée de la formule souple de travail, les ressources et la capacité opérationnelle de l'entreprise. Ces raisons sont justifiées concrètement lorsque l'employeur précise, dans le cadre de la situation concrète de la demande, quels problèmes spécifiques se posent en lien avec le fonctionnement de l'entreprise.

Cette justification concrète peut être réitérée par l'employeur chaque fois que le même travailleur présente des demandes identiques à bref intervalle, tant que la situation du travailleur reste inchangée.

5. Procédure de concertation sociale et modification des conditions de travail

Si l’aménagement des modalités de travail existantes du travailleur implique une modification des conditions de travail régies par une convention collective de travail ou par un règlement de travail, il convient de suivre la procédure appropriée pour adapter l'instrument et, si nécessaire, d'engager un dialogue social devant l'organe de concertation compétent (conseil d'entreprise ou délégation syndicale).

À moins qu'un cadre adéquat n'existe au niveau de l'entreprise, les secteurs peuvent également créer un cadre pour des formules souples de travail, mais sans modifier la condition d'ancienneté et sans porter préjudice aux régimes de travail introduits au niveau de l'entreprise.

6. Retour (anticipé)

A l’issue de la période de formule souple de travail, le travailleur a le droit de reprendre ses modalités de travail de départ.

Par une demande écrite et motivée, tant l'employeur que le travailleur peuvent demander de suspendre ou de mettre fin anticipativement à la formule souple de travail, afin de revenir aux modalités de travail de départ. La réponse écrite et motivée de l'autre partie doit suivre dans un délai maximum de 14 jours à compter de la demande. Si le travailleur refuse de se conformer à la demande de l'employeur, cela ne peut entraîner des conséquences négatives pour le travailleur.

7. Nouvelle demande ou prolongation

Tout travailleur a le droit de demander une nouvelle formule souple de travail ou la prolongation de sa formule souple de travail actuelle, pour maximum 12 mois.

Si la prolongation vise le même objet et les mêmes modalités d’aménagement du temps de travail, une prolongation peut être convenue de commun accord entre le travailleur concerné et l’employeur.

8. Règles dérogatoires

Par le biais d’une CCT sectorielle ou d'entreprise, il est possible de déroger à :

  • la période maximale de 12 mois pour la formule souple de travail ;
  • le délai de 3 mois pour l'introduction de la demande ;
  • la procédure de prolongation simplifiée en cas de nouvelle demande. 

Au niveau de l'entreprise, ces adaptations peuvent également se faire moyennant un accord entre l'employeur et la délégation syndicale ou, en l'absence de délégation syndicale, de commun accord entre les travailleurs concernés et l'employeur.

Il peut également toujours y être dérogé de commun accord entre le travailleur concerné et l'employeur.

9. Protection contre les mesures défavorables et le licenciement

Un travailleur qui exerce son droit à une formule souple de travail est protégé contre :

  • des mesures défavorables par l'employeur (telles que le non-renouvellement d'un contrat à durée déterminée) ; et
  • le licenciement.

Les mesures défavorables et le licenciement ne sont autorisés que si les motifs qui les motivent sont étrangers à l'exercice des droits qui découlent de la CCT n° 162.

La protection court à partir de la demande écrite jusqu'à deux mois après la fin de la formule souple de travail ou jusqu'à deux mois après le refus de la demande. Si aucune formule souple de travail n’est entamée, la protection prend fin deux mois après la date de début demandée.

Si le travailleur établit des faits laissant présumer qu’il a été soumis à un traitement défavorable ou a été licencié en raison de sa demande de formule souple de travail, il incombera à l’employeur de prouver que le traitement défavorable ou le licenciement était fondé sur des motifs étrangers à l’exercice des droits qui découlent de la CCT n° 162.

Si l'employeur échoue dans la charge de la preuve, il peut être tenu de payer au travailleur une indemnité de deux à trois mois de rémunération. En cas de licenciement, cette indemnité s'élève à quatre à six mois de rémunération. L'indemnité de protection n'est pas cumulable avec d'autres indemnités de rupture, à l’exception d’une indemnité de préavis, d’une indemnité de non-concurrence, d’une indemnité d’éviction ou d’une indemnité complémentaire qui est payée en plus des allocations sociales. L’indemnité peut également être cumulée avec une indemnité pour discrimination, sauf si celle-ci est fondée sur le critère protégé des responsabilités familiales.

10. Neutralisation (CCT n° 103/6)

Les périodes de réduction des prestations de travail à la suite d'une formule souple de travail sont neutralisées en ce qui concerne les dispositions liées aux limites de prise d’un crédit temps. Cela signifie que le recours à des formules souples de travail n'entrave pas la possibilité pour le travailleur de prendre un crédit temps.

 A retenir

Les travailleurs ont désormais le droit de demander une formule souple de travail. L'employeur peut refuser cette demande, sur la base de justifications motivées et concrètes. Il peut également reporter cette formule de travail ou formuler une contre-proposition.

Les travailleurs qui ont introduit une demande de formule souple de travail sont protégés contre les mesures défavorables et le licenciement.